Tout ce que vous ne saviez pas sur Josephine Baker

Tout ce que vous ne saviez pas sur Josephine Baker

Une icône qui continue de briller, 119 ans après sa naissance !

Il suffit de prononcer son nom pour que les esprits s'échauffent, et que l'on ait de nombreuses images en tête. Icône du Paris des Années folles, danseuse sulfureuse à l'iconique ceinture de bananes, mais aussi chanteuse de jazz qui se produisait au Casino de Paris, Joséphine Baker était une femme complexe pleine de nuances, à la fois artiste multi-facettes, résistante et mère d'une famille nombreuse, en quête constante de liberté et de justice.

Née le 3 juin 1906, celle qui est devenue la première icône noire, et la 6ème femme à entrer au Panthéon, aurait fêté ses 119 ans. A cette occasion, Jazz Radio revient sur l'histoire exceptionnelle de cette femme qui a eu mille fois dans une, et qui ne cessera jamais de nous fasciner. 

Une Cendrillon des temps modernes, qui a toujours cru en sa bonne étoile

Vous connaissez l'histoire de Cendrillon, le célèbre conte de Charles Perrault ? Hé bien Joséphine Baker, c'est un peu une version américaine mais surtout plus moderne de ce conte bien connu des enfants. Née en 1906 à Saint-Louis dans le Missouri aux Etats-Unis, la petite Joséphine grandit dans une famille pauvre, oscillant entre les périodes à l'école et celles où sa mère l'envoie faire des ménages pour ramener un peu d'argent à la maison. Même si le quotidien n'est pas tout le temps des plus joyeux, avec un père qui abandonnera sa famille, Joséphine sait déjà qu'elle aime danser et amuser la galerie. 

Aurait-elle pu s'imaginer que, 20 ans plus tard, elle deviendrait une véritable star, une égérie des Folies Bergère, habillée par les plus grands couturiers de l'époque ? 

Mais si, dans le conte original, la souillon devenue princesse doit compter sur la présence de sa marraine, Joséphine Baker, elle, ne comptera sur personne si ce n'est sur elle même. C'est elle qui, de son plein gré, ira frapper à la porte du destin, entrant d'abord par la petite porte en devenant habilleuse de la troupe des Dixie Steppers, avant de devenir une des chanteuses principales de Shuffle Along. Comme quoi, quand Disney nous disait qu'il fallait toujours croire en ses rêves, Joséphine pourrait en être une parfaite héroïne. 

L'art de la grimace

Après avoir brillé à Broadway, Joséphine Baker a une opportunité en or qui l'emmène outre-Atlantique, et plus particulièrement à Paris. Le job de ses rêves ? Devenir la vedette d'un tout nouveau show où on fera d'elle une véritable star, la "Revue nègre". Et si la jeune fille s'est faite remarquée, c'est bien sur pour ses mouvements de danse, mais aussi... pour ses grimaces

Car oui, Joséphine Baker n'est pas une petite précieuse qui veut toujours être impeccable : elle n'a pas peur du ridicule, et n'hésite pas à loucher, tordre son visage, se rendre plus laide qu'elle ne l'est réellement. C'est d'ailleurs l'arme ultime de Joséphine Baker : grâce à cette façade et ses grimaces, la jeune fille cacher ses peurs, ses angoisses et son stress. Et même, aussi surprenant que cela puisse paraître : ses complexes. 

Depuis qu'elle est petite, on répète à Joséphine qu'elle n'est pas jolie. Plus tard, en commençant sa carrière, on dira d'elle qu'elle était trop petite, trop maigre. Qu'elle manquait d'élégance. Mais qu'à cela ne tienne : Joséphine avait conscience de ses charmes, et savait exactement comment se mettre en valeur. 

"Je n’ai pas la prétention d’être jolie. J’ai les genoux pointus et les seins comme une garçon de dix-sept ans. Mais si mon visage est maigre et laid, si les dents me sortent de la bouche, mes yeux sont beaux et mon corps intelligent". (entretien pour Marseille-Matin, le 21 novembre 1931).

Admirée par le tout Paris, Joséphine Baker prendra sa revanche sur tous ceux qui la jugeaient sur son physique.

La France dans le cœur 

Joséphine Baker ne s'en est jamais cachée : elle a vécu son arrivée à Paris comme une petite révolution personnelle, elle qui s'est toujours sentie bien dans les rues de la capitale. Un amour, qui lui donnera envie de donner bien plus que quelques danses à la France. Car oui, l'artiste a été l'une des actrices de la résistance pendant la Seconde Guerre Mondiale. Sans doute aussi parce qu'elle s'est mariée avec un industriel français juif, François Lion, et qu'en prenant sa nationalité, elle décidera d'entrer en résistance contre le nazisme. Elle ira même jusqu'à refuser de chanter à Paris tant que les Allemands occuperont le territoire. 

Jouant de son carnet d'adresse et de ses relations, la star de cabaret profitera de ses invitations dans les ambassades européennes pour collecter des infos pour le contre-espionnage. Après la libération de la France, la chanteuse va se produire près des lignes de front, offrant des concerts gratuits autant aux soldats qu'aux civils. À partir de mai 1945, elle chanta également en Allemagne devant des rescapés des camps de concentration. En 1946, elle fut décorée de la médaille de la Résistance.

Le 28 août 1963, elle participe à la célèbre marche pour les droits civiques à Washington, marquée par le discours historique de Martin Luther King. Devant 250 000 personnes, elle prit la parole pour saluer, entre autres, l’accueil réservé aux artistes afro-américains à Paris. Elle livra un vibrant hommage à la liberté, dans un pays encore marqué par la ségrégation qu’elle dénonçait depuis longtemps. Déjà, en 1951, lors d’un concert en Floride, elle avait exigé que l’entrée soit ouverte à tous, contribuant ainsi à briser les barrières raciales dans les clubs de Miami.

Chanteuse de jazz ou d’opérette ?

Joséphine Baker, c’est une carrière qui s’étend sur près d’un demi-siècle. Cela ne signifie pas pour autant que l'on parlait uniquement de danses effrénées. À ses débuts à Paris, le public accourt pour admirer ses déhanchés audacieux. Mais à l’approche de la Seconde Guerre mondiale, elle se produit au Casino de Paris, où elle continue de danser tout en dévoilant désormais sa voix, légère et teintée de jazz.

En 1934, on lui propose le rôle principal dans La Créole, une opérette de Jacques Offenbach. Une opérette ? Joséphine craint que le style manque de swing. Sera-t-elle capable d’interpréter la musique de ce célèbre compositeur ? "Il est mort", lui répond-on. Rassurée, elle accepte le rôle et enchaîne les représentations au Théâtre de Marigny, jouant à guichets fermés pendant plusieurs semaines.

Sur scène, elle semble capable de tout. C’est face au public qu’elle s’épanouit pleinement.