Le 10 juin 2004, le monde de la musique perdait l'une de ses figures les plus emblématiques : Ray Charles. A 73 ans, celui que l'on surnommait affectueusement "The genius" rendait son dernier souffle, laissant les mélomanes du monde entier en deuil.
En plus de 50 ans de carrière, le pianiste, chanteur et compositeur américain a traversé le temps et les époques, devenant une figure majeure de la musique noire américaine, offrant son génie dans plusieurs genres musicaux, entre le jazz, le gospel, le blues, le rhythm and blues, mais surtout la soul, lui qui a souvent été considéré comme l'un des pères fondateurs de ce mouvement, avec Sam Cooke et Solomon Burke. Alors en hommage à cet artiste de génie, voici les anecdotes folles concernant le roi de la soul, le grand Ray Charles !
La tragédie derrière la cécité de Ray Charles
On vous en parlait il y a quelques jours : si Ray Charles est devenu pour beaucoup une vraie leçon de courage et d'abnégation face à sa cécité, l'artiste n'a pas toujours été aveugle. Et une certaine légende est tenace : celle où c'est à cause d'un traumatisme que le petit Ray Charles est devenu aveugle. Un choc émotionnel, survenu à cause de la mort du petit frère de Ray, Charles, qui s'est éteint devant ses yeux. Face à la tristesse et l'impuissance, Ray aurait perdu progressivement la vue.
Mais la réalité est tout autre. En réalité, Ray Charles était malade, avec un trouble clairement identifié : un glaucome infantile non traité. Une maladie dégénérative de l’œil qui, sans prise en charge, provoque une perte progressive de la vision. Et à une époque où la ségrégation frappe de plein fouet le sud des États-Unis, l'accès aux soins d'un petit garçon noir et pauvre est loin d'être une priorité. Même la médecine n'aurait pas pu le sauver. Aujourd’hui, on en est sûr : Ray Charles est devenu aveugle parce qu'il était malade, pas parce qu'il était ivre de chagrin. Mais de ce handicap est né sa force, lui qui ne s'est jamais posé de limites pour aller au bout de ses rêves, comme il l'a expliqué au New York Times.
"De toute façon, je faisais ce que je voulais faire. Je faisais de la musique depuis l'âge de trois ans. Je voyais déjà. J'ai perdu la vue à sept ans. La cécité n'y était donc pour rien. Elle ne m'a rien apporté. Et elle n'a rien coûté." - Ray Charles
Quand "Georgia in my mind" devient un hymne national
L'histoire commence en 1930, quand le compositeur américain Hoagy Carmichael invite son vieux copain de fac devenu banquier, Stuart Gorrell à boire un verre chez lui à New York. Alors qu'ils sont tranquillement adossés face au piano, les deux hommes constatent que l'hiver est bien installé, et pour se réchauffer le cœur, inventent des paroles d'une chanson où ils s'imaginent sous le soleil de Géorgie. Ils sont bien loin de se douter qu'ils viennent de créer un titre qui deviendra un hymne.
Des années plus tard, un certain Ray Charles ajoute la chanson à son répertoire. Mais dans sa bouche, les mots résonnent encore plus fort au vu de ce qu'il a vécu à cause de la ségrégation. Alors que le chanteur devait se produire dans une salle de concert en Géorgie, ce dernier a refusé de jouer pour la simple et bonne raison qu'il n'acceptait pas que seul un public blanc soit autorisé à assister à son show. Sa rébellion le conduira à être banni de l'état qui l'a vu naître.
Mais après l'abolition de la ségrégation et des lois raciales, le gouvernement de Géorgie a décidé de se repentir, lui présenta des excuses publiques et Georgia on My Mind devint l’hymne de l'État de Géorgie, le 24 avril 1979. Une belle leçon de vie pour celui qui s'est toujours battu pour des causes importantes.
Ray Charles, ou la passion des échecs
Si Ray Charles a longtemps lutté contre ses addictions à la drogue, c'est au sein d'un programme de rééducation qu'il a découvert une autre de ses addictions, bien plus saine : les échecs. En 1965, Ray Charles intègre l'hôpital St. Francis, près de Los Angeles, dans le but de se soigner. C'est là qu'un médecin de la clinique lui enseigne ce jeu de stratégie. Un bon moyen pour l'artiste de s'occuper la nuit en jouant avec les patients de la clinique, lui qui lutte contre l'insomnie.
Ray Charles adore ce jeu, notamment parce qu'il considérait que pour gagner, ce n'était pas une question de chance, mais plutôt d'habileté.
"On commence avec les mêmes pièces aux mêmes endroits. [...] Il faut être plus malin, plus réfléchi et plus habile que l'autre." - Ray Charles
Jusqu'à la fin de sa vie, Ray Charles a nourri cette passion pour les échecs, et s'est même fait fabriquer son propre échiquier, dont l'un est toujours exposé au Musée d'histoire américaine. L'échiquier de Ray Charles est composé de cases de hauteurs alternées, avec des cases noires légèrement surélevées et des cases blanches plutôt abaissées. Pour faciliter l'identification tactile des pièces, les pièces noires ont des sommets plus pointus, tandis que les blanches ont des sommets arrondis.